Vie continue

J'aurais pu appeler ce blog "Pensées", ou "Réflexions" ou "Chroniques d'une vie ordinaire", que sais-je ? J'ai choisi Vie continue car à chaque tuile qui tombe,il faut à chaque fois, non pas repartir - car on ne s'est pas arrêté - mais continuer: il n'y a pas d'autre alternative. Continu ou alternatif, maintenant vous êtes au courant !

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mardi, octobre 19 2021

Resto du jour, bonjour

Ayant réalisé qu'il me restait 2 jours de liberté et non pas 1, avant l'arrivée de ma famille, puis ayant constaté que le boucher chez qui je comptais acheter ma viande était fermé, j'ai eu envie de m'offrir un petit repas sur une terrasse accueillante. J'ai donc fait un tour en ville : je voulais changer du dernier où j'étais allé. Heureusement, je connais quelques bonnes adresses.

Je me suis donc retrouvé sur une belle terrasse non loin des berges aménagées du gave. Il n'y avait que deux ou trois tables occupées, lorsque je suis arrivé, mais petit à petit, la terrasse s'est remplie et, bientôt, tout fut complet ou presque. Il y avait là un échantillonnage complet d'actifs, et moins actifs, et même une table qui semblait être une réunion de famille. En face de moi, un petit couple de retraités savourait leur déjeuner. Plus loin, une tablée d'employés de bureau, reconnaissable aux tenues vestimentaires des hommes, toutes sur le même modèle, manque cruel d'individualité, ou obligation du service ? Comme j'arrivais à la fin de mon repas, un certain brouhaha commença à s'élever: comme d'habitude chacun parle plus fort pour couvrir le bruit du voisin; alors, bien que j'apprécie parfois la compagnie des humains, cela commençait à faire un peu trop de bruit pour moi. Je me suis donc levé, et suis allé payer mon écot. Le patron m'a reconnu, et même si l'échange fut bref, cela m'a fait plaisir. Il est vrai que je suis un client de longue date, et également son ami sur un réseau social. En plus d'être bon dans son boulot, et sympa, j'ai pu remarquer que nous avions souvent des opinions similaires sur les sujets qui fâchent... je rigole un instant parce que je viens de penser que ma sœur m'affirmerait en riant (quoi que ?)  qu'ayant tenu boutique pendant 30 ans, j'ai acquis une certaine notoriété...pfff, c'est du passé ça...en plus, ladite notoriété, si tant est que j'en avais, ne m'a pas empêché de manquer de clients.

J'ai décidé d'aller prendre un deuxième café sur une terrasse dans mon ancien quartier là où j'ai habité pendant 20 ans et travaillé pendant 30. Je traverse donc la ville, fort calme à cette heure-ci: tout le monde déjeune... quoi que même en dehors de l'heure du déjeuner la ville n'est, malheureusement, plus guère active... je vois avec tristesse plusieurs devantures vides et poussiéreuses, dans une rue qui, il y a à peine 10 ans étaient encore pleine d'activité. Il faut dire qu'il y a des travaux en ville mais cela ne s'explique pas tout. L'arrivée de grandes surfaces en périphérie a achevé le commerce de centre-ville, comme dans bien des endroits. Les maires disent en général que c'est pour répondre à un besoin, mais n'a-t-on pas plutôt créé le besoin ? C'est tout l'art du marketing J'avais baissé les bras depuis longtemps, à ce sujet: il est des choses contre lesquelles on ne peut pas se battre, surtout quand personne ne suit.

Arrivé au bistrot à la terrasse duquel je pensais prendre mon café, je me rends compte que j'ai encore oublié que le mardi est son jour de congé. Zut. Je décide d'aller un peu plus loin rendre visite à un parc où je n'ai pas été depuis très longtemps. Ce faisant, je m'avance sur ce qui était autrefois la route nationale, avant qu'il y ait la voie d'évitement. Ici aussi il y a de vieilles devantures et fermées, mais celles-ci le sont depuis avant mon arrivée il y a trente ans: déjà on pouvait sentir que la ville avait eu son heure de gloire mais était sur le déclin... pourquoi ne l'ai-je pas vu à l'époque et suis-je resté m'enterrer dans ce coin ?  je crois que je n'avais pas vraiment envie de le voir, et puis je ne cherchais pas à faire fortune, mais à pratiquer mon métier honnêtement.

J'arrive enfin au parc. J'aurais pu rentrer par la route principale, un peu plus loin, mais je préfère passer par le petit sentier réservé aux piétons, qui serpente dans la pente. J'entends des voix au loin. J'espère que des clodos n'ont pas accaparé la place, là-haut ? En effet, je me méfie quelques peu de ces gens, ayant autrefois été alpagué par l'un d'entre eux, or ici le coin est plutôt désert... Je décide de m'asseoir ici, face à la colline surmontée de sa vieille église du treizième siècle, et de continuer à écrire. Bientôt des gens arrivent, que je reconnais, du moins une qui travaillait chez un assureur dans le quartier. Je dis travaillait mais elle n'est pas si vieille et ne doit pas être encore à la retraite... nous nous saluons mutuellement, puis quand ils sont passés, je me lève et reprends ma marche. En bas sur l'ex-nationale, les voitures ont recommencé à circuler: la pause déjeuner est finie. Je sens les odeurs de gasoil qui remontent. Oui, il est temps que je m'éloigne.

Les souvenirs affluent soudain: je me rappelle des hivers où ces pentes étaient recouvertes de neige et où parfois j'emmenai, avec une luge, le gamin que nous élevions. C'était alors une après-midi qui résonnait de cris et de joie...le bon temps... Enfin, pour ces moments-là, du moins...

J'ai finalement rejoint le chemin principal: une petite route bordée de platanes majestueux; sur les bas côtés, de nombreuses colchiques fleurissent... c'est la fin de l'été ? Voire ! Il faisait frais ce matin et je regrette à présent le t-shirt à manches longues, un peu épais que j'ai enfilé, parce que je transpire... enfin, je ne sens plus les odeurs d'essence mais celles des arbres, des fleurs et des feuilles. C'est beau... Aïe ! Pourquoi les moustiques gâchent-il toujours les bons moments ?!!

À présent, je domine bien la ville. De loin en loin, un arbre au feuillage roux ou mordoré pose une petite tache de couleur au milieu des maisons... je suis à la hauteur des serres municipales. Juste en dessous de moi, un mur de pierre délimite un petit pré où paissent trois ânes. "Un âne, des nânes", disait le gamin, avec sa logique enfantine !

J'arrive enfin sur le plateau: une allée ombragée me tend les bras. Les arbres qui la bordent sont magnifiques. Ils étaient beaucoup moins grands, me semble-t-il, lorsque je suis venu la dernière fois ?  J'ai remarqué, que bien souvent, c'est grâce aux arbres que l'on mesure le temps qui passe: eux se fortifient et grandissent en vieillissant, nous, c'est le contraire...

Ne serait-ce le bruit des voitures qui montent de la nationale, l'endroit serait idyllique. Je revois le fameux lit végétal qui étonnait tant les gamins...hop, photo ! Je m'assois sur un banc à l'ombre, j'entends le bruit d'un avion qui traverse le ciel au loin et cela me rappelle les chaudes après-midi d'été, où, lorsque nous étions petits, ma mère descendait un store à lamelles de bois léger sur le balcon, pour que nous puissions faire la sieste dehors...douceur et farniente... je me gratte les chevilles: ces sales bêtes m'ont encore piqué ! Je me lève et repart plus loin.

Je suis sorti du parc et me voici à présent sur la route de crête de la colline: je peux voir la plaine de l'autre côté. Sur la droite, la route, apparemment refaite récemment, mène vers la nationale et passe devant ce qui semble être une extension de la maison de retraite pas loin, moderne et très moche. Quelle idée d'avoir construit cela en cage à lapins ? Je pars plutôt sur la gauche sur cette petite route que je sais revenir vers la ville.

Je rencontre un chat, curieux et guère sauvage mais qui ne se laisse tout de même pas approcher de trop près. Je tente de l'intriguer en me cachant un peu, pour le faire approcher, cela réussi en partie, mais je m'impatiente et reprends ma balade. Tant qu'il reste ici sur la crête entre parc et pré, il a la belle vie, et ne risque rien. Je continue à marcher sur cette petite route étroite. Lorsque je suis arrivé  dans la région, elle était encore ouverte à la circulation et se terminait par une pente hyper raide sur laquelle ma voiture a failli rester coincée ! La pente existe toujours mais la route est fermée à la circulation.

Oh ? une chèvre ! Elle est dans un champ très en pente, entouré d'un grillage. Je cueille quelques feuilles de pissenlit et les lui offre... apparemment elle aime bien ça. Ah, mais elle a une copine, un peu plus bas. Je vois ladite copine grimper dans un arbre pour mâchouiller des feuilles du jardin d'à côté. Ben, pourtant un peu plus bas le champ ne manque pas d'herbe ? La première passe le museau sous le grillage pour essayer d'attraper l'herbe sur le bord du chemin. Ma parole, elle n'a pas peur de risquer de se retrouver coincée ?  Je reprends ma route, car les moustiques attaquent à nouveau... Je passe la forte pente qui finit le chemin, tourne à gauche et descends à présent la pente qui me ramène au centre-ville, non sans avoir au préalable pris une photo, car la vue est magnifique.

Je passe à présent devant le lieu de mon ex-boulot. Mais diable que je suis content d'être à la retraite: je n'ai aucun regret d'avoir cessé mon activité.   Je salue de la main un copain qui, de l'autre côté de la route, va dans la même direction que moi. Nous discutons à travers la rue puis il finit par traverser pour me rejoindre et m'accompagne un petit moment en philosophant. Petit moment sympa.

Bientôt, j'arrive non loin du parking où j'ai garé ma voiture. Je n'ai pas très envie de retourner m'enterrer chez moi, mais j'ai quelques courses à faire,  mais finalement, pour tout dire, je sens qu'une petite sieste ne me ferait pas de mal... va pour la sieste: je ferai les courses demain.

mardi, octobre 12 2021

Une journée très réussie

La journée n'avait pas très bien commencé : je m'étais couché tard hier et ce matin j'étais un peu au radar. Qui plus est, j'avais rendez-vous chez le dentiste en fin de matinée , ce qui n'est jamais très agréable, mais j'avais mal depuis maintenant 15 jours que j'avais pris mon rendez-vous.

Sortant assez tard de chez le dentiste, je résolus de profiter du beau temps pour aller manger un steak tartare sur une terrasse bien ensoleillée de ma connaissance. Ce goût pour le steak tartare ne m'est venu qu'assez récemment lorsqu'un boucher chez qui j'étais client a ouvert un restaurant associé à sa boutique: je me suis dit que, chez un boucher, le tartare devait être bon.... Et c'était le cas.
En plus j'aime bien cet endroit, qui m'en rappelle d'autres, ailleurs, dans une autre vie: c'est un pôle d'activité, dans une zone un peu à l'extérieur de la ville; s'y retrouve un peu le même genre de gens que partout ailleurs dans ce genre d'endroit: des employés de bureau, des ouvriers, des représentants de commerce, des techniciens, etc, bref, des actifs. Pendant un instant, j'ai ainsi l'impression de l'être encore.... À l'époque où je travaillais pour une grosse boîte, il m'arrivait ainsi de devoir aller faire des stages ou des réunions de ci, de là, souvent dans des zones comme celle-ci, et je dois dire que cela me plaisait assez. Dans ces zones, un des points communs est que les routes sont bien entretenues, marquage au sol y compris, les pelouses sont nombreuses et toujours bien tondues et les arbres bien taillés. Dommage qu'il n'y soit pas prévu davantage de passages piétons: je serai bien allé faire un tour à pied dans ce coin. Il est vrai que les gens ne sont ici que de passage et ne s'arrêtent que pour manger ou faire une course...et encore n'est-ce ici qu'une petite ville.
J'ai fini de manger et siroté mon café. Il fait bon, je profite du soleil, qui m'incite à la farniente. Que vais-je faire, cet après-midi ? Aller me balader, oui, mais où ?
L'idée me vient d'une balade sur les coteaux, que je faisais, autrefois... je décide d'aller faire quelques courses chez le primeur à côté puis de ramener tout cela chez moi et partir faire la balade. Dont acte.
Je pars de mon village pour aller faire la balade. Pour cela, je traverse la ville voisine et prend une route que je n'ai pas parcourue depuis... environ 10 ans ? Un peu moins, je pense, mais plusieurs années, c'est sûr. Je roule sans excès de vitesse: je profite. Je pense... je passe devant une maison que nous avions visité autrefois, avec feu mon épouse, maison que nous n'avions finalement pas acheté: je trouvais que la maison était trop souvent à l'ombre. Elle est toujours à l'ombre mais elle a bien changé: quand je repense à la ruine qu'elle était...  je tourne au croisement... tiens  ? la maison de l'angle a été repeinte de fraîche date. Je parcours une partie du chemin que je ferai à pied tout à l'heure, je reconnais un croisement qui part vers le haut à droite, puis un autre, et puis j'arrive au parking, devant une petite chapelle, à côté du cimetière. Je me rappelle que je suis venu là... avec mes frère et sœur, me semble-t-il ? Je me gare, je prends mon sac dans mon coffre, avec mon bâton de marche, ferme ma voiture à clé, puis je démarre mon application de randonnée: je trouve cela bien pratique pour savoir combien de temps je marche, sur quelle distance et éventuellement quel dénivelé je parcours.
Je démarre d'un bon pas mais pas trop vite tout de même: je tiens à garder un bon rythme et je sais bien que lorsqu'on part trop vite on risque le coup de barre:  lorsque je fréquentais encore les clubs de randonnée, combien de gens ai-je vu ainsi partir comme des fous, que je rattrapais et doublais aisément, ensuite ? La route monte sec. Je sens une vague douleur dans ma poitrine: j'ai le souffle un peu court. Je songe à m'arrêter un brin ou à ralentir, mais finalement, je garde mon rythme en faisant des pas plus petits, sinon je vais me fatiguer très vite. Je me dis que je n'aurais peut-être pas dû mettre ce t-shirt à manches longues ? J'ai très chaud... heureusement, la route passe par un endroit à l'ombre, et là, il fait bon: en effet, le fond de l'air est quand même un peu frais. J'arrive bientôt en haut de la côte, je n'ai plus la douleur à la poitrine: ma respiration s'est calmée et mon cœur aussi. Je suis à présent la route de crête du coteau. La montagne est loin derrière une barrière de nuages, on ne distingue que ses sommets. C'est curieux: les montagnes paraissent, ainsi, bien plus hautes qu'elle ne le sont réellement. La marche est agréable. Il y a tout du long de jolis prés avec ou sans vaches, et de belles maisons, de temps en temps, un chien jette un aboi d'avertissement. J'arrive à la hauteur d'une petite chapelle: je me rappelle y être allé avec un groupe de mon village, il y a quelques années: nous y avions fait devant, une pause casse-croûte, et j'avais pris de super photos avec le soleil de face qui faisait une étoile près d'une croix du cimetière. Plus loin, j'arrive devant une maison qui appartenait à une relation lointaine, si mes souvenirs sont bons. Nous y avions fêté je ne sais plus quoi, avec une association à laquelle nous appartenions tous deux. Ce gars-là doit être mort à l'heure actuelle: il était déjà bien plus âgé que je ne le suis aujourd'hui, et la fête dont je parle, date d'il y a bien 20 ans... que dis-je 20 ans  ? 30, plutôt. Je continue ma marche... oui, décidément, il y a vraiment de jolies maisons: je ne me rappelais pas de toutes mais maintenant que je les revois... Une première route descend sur la droite: si je le veux, je peux descendre, je vois à peu près où la route atterrit, et ensuite je ne suis pas loin de la voiture... mais non: je me sens bien, je vais faire le grand tour. Je continue ma marche, et passe devant des maisons et des fermes bien paisibles. Je me sens vraiment très bien. La route monte une belle pente; je m'y lance, en faisant des pas plus petits, comme précédemment, et j'avale la côte comme qui rigole: je me retrouve en haut sans y penser. Quels progrès ai-je fait en un an ! Quand je pense qu'après mon embolie, j'avais du mal seulement à mettre un pied devant l'autre... je retrouve des sensations perdues. Cette sortie me fait, décidément, le plus grand bien ! Elle me donne envie d'en faire encore plus. Je pense que je vais me remettre sérieusement à mes randonnées campagne... et pourquoi pas un peu de VTT ? Il faudrait que je fasse remettre en état le vélo, depuis le temps que je le dis... ouais, ce ne serait pas mal: je pourrais amener le vélo sur place et faire un tour sur les chemins: il en est que je n'ai jamais faits car ils sont trop longs à pied. Je pourrais aussi partir à vélo de la maison, mais je ne me sens pas très à l'aise à vélo sur les routes à grande circulation.
J'arrive à un croisement: un chemin descend sur la gauche. Je sors mon smartphone et je consulte la carte IGN de l'application de rando. Je me redis encore une fois que c'est bien pratique. Je vois ainsi que ce chemin, qui n'est pas goudronné, descend dans le fond de cette vallée là-bas, puis remonte sur la crête en face, où il rattrape un sentier GR, et poursuit un cheminement parallèle à celui où je suis actuellement pour le rejoindre un peu plus loin. J'hésite: et si je me lançais sur ce chemin ? Je décide que non: pas cette fois-ci. C'est la première fois depuis longtemps que je suis parti me balader à la campagne un peu plus loin de chez moi, je vais donc me tenir à mon itinéraire premier que je connais déjà. Celui-ci, par contre, je le ferai une autre fois: je ne suis pas sûr du tout de ma forme actuelle. Pour être franc, il y a une autre raison à ma décision: ce nouveau cheminement passe à proximité de fermes, où je risque de rencontrer des chiens, patous, par exemple, et il se trouve que je ne suis pas très copain avec ces animaux-là, même si j'ai fait de grand progrès, ces dernières années. En deux mots comme en cent, je préfère n'être pas tout seul pour m'aventurer dans ce genre d'endroit...et puis même si je le fais, ce ne sera, de toute façon, pas aujourd'hui.
En principe, d'après la carte, un sentier doit partir de l'autre côté, cela m'éviterait de faire un grand détour, seulement il y a un hic: un grand portail, ouvert, certes, mais aussi un grand panneau marqué "propriété privée". Zut ! J'hésite: je tente quand même ? Je m'engage un peu sur un des chemins qui semble être celui décrit par la carte, quoi que les tirets semblent indiquer plutôt un sentier et je vois plus bas un tracteur avec une carriole qui bloque le chemin. Est-ce vraiment privé ou bien  est-ce quelqu'un qui a mis une barrière et a dit ceci est à moi, alors que ce n'est pas le cas ? Je pense à cela car j'ai déjà vu ce genre de chose chez ma compagne:  nous avions l'habitude de passer par un sentier qui longeait une maison, or un jour le propriétaire de la maison a barré ledit sentier... après avoir demandé au maire ce qu'il en était, il s'est avéré que ce monsieur n'avait pas le droit de le faire et le maire envisageait de lui envoyer un petit mot pour qu'il rétablisse le passage...les gens sont gonflés quand même...
Mais bon, aujourd'hui, je préfère éviter les problèmes et les discussions... je ferai donc le grand détour... À quelque chose, malheur est bon : cela me permet de revoir un fort beau paysage que j'avais oublié ! Il est vrai que j'ai parcouru ces crêtes bien souvent, à une époque lointaine. Surtout ne pas laisser le passé me submerger, sinon je vais penser avec regret à un adorable petit bambin qui était comme mon fils... le passé est passé, c'est même un passé dépassé, comme chantait je ne sais plus qui.

Enfin, je trouve la route qui redescend au pied du coteau. J'aurais pu continuer un peu plus loin et passer par le village, cela fait partie, je crois, du chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle: ils ont planté tout le long, des arbres fruitiers de variétés anciennes dont les fruits sont destinés aux pèlerins... mais je tourne là: cela suffira pour aujourd'hui. Je m'arrête en bref instant devant une vigne derrière laquelle se profilent les montagnes au loin et j'en profite pour prendre une photo.

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Encore quelques mètres et j'arrive à la route d'en bas. Il était temps, je commence à sentir mes genoux: les descentes ne me valent rien. À présent une longue route m'attend à fond de vallée, sur une route quasiment plate... Elle se fait finalement assez rapidement, avec simplement une pause pour boire un coup, car j'ai pris la précaution d'emmener ma gourde. Je passe devant une maison où une dame repeint sa barrière, et nous nous saluons mutuellement. Je me dis que sa tête ne m'est pas inconnue... Sûrement une ancienne cliente ?  Ça me fait toujours drôle: je compare cela à ma compagne lorsqu'elle rencontre un ancien élève.

J'arrive enfin à ma voiture. J'arrête mon application rando: environ sept kilomètres, une heure et demie de marche, cent cinquante mètres de dénivelé. Mouais, ce n'est pas trop mal. D'un autre côté, la marche sur route goudronnée ne me réussit guère: je commençais à avoir vraiment mal aux genoux... et aux pieds. Je monte dans ma voiture, après avoir rangé mon sac et mon bâton.  Je reviens chez moi par le même chemin. Ce faisant, je repasse devant la maison où la dame repeignait sa barrière, et je vois qu'ils sont à présent tout un groupe à discuter, dont un vieux monsieur que je connais fort bien car, lui, j'en suis sûr, c'est un ancien client très sympathique, que j'ai déjà eu l'occasion de rencontrer, dans une salle d'attente, depuis que j'ai arrêté de travailler. Je quitte ce coin, le sourire aux lèvres: j'ai adoré mon boulot.

Je pensais, en revenant, aller sur la terrasse de mon café préféré pour boire un thé, et finir dignement ce bon après-midi, mais j'avais oublié que c'était aujourd'hui son jour de fermeture hebdomadaire. Zut ! Je n'ai pourtant pas envie de rentrer tout de suite:  je ressens le besoin de voir du monde, avant de me retrouver tout seul chez moi.

Il me revient alors cette histoire de vélo, auquel je pensais tout à l'heure. Je consulte ma montre: j'ai juste le temps de rentrer chez moi, décrocher le vélo de son perchoir, prendre mon porte-vélo pour le fixer sur la voiture et aller emmener l'engin chez le réparateur... depuis le temps que je dois le faire !  Et ensuite, il faudra que je fasse ma soupe pour la semaine: ce sera courge, courgette, oignon, avec du bouillon de poule, bref, un potage léger pour le soir. Ensuite, je bouquinerai un peu ou bien je regarderai la télé, à moins que je n'aille faire un petit tour sur les réseaux sociaux, jouer un peu. Une soirée calme, de toute façon.

Ce fut finalement une bonne journée  bien remplie et très réussie !

jeudi, novembre 5 2020

Balade sur le Truc

Nous sommes partis de la maison vers 7h du matin. Il faisait plutôt frais et même je peux dire carrément froid. Je laissai ma compagne conduire: après tout, c'était sa voiture et de temps en temps je ne déteste pas jouer le passager pour regarder les paysages et laisser aller mes pensées. Nous avons pris l'autoroute car c'était plus rapide pour contourner la montagne. J'aime bien l'autoroute: les paysages défilent et l'on peut imaginer les vies de tous les gens pas loin de qui l'on passe. C'est l'automne, les feuilles prennent leurs couleurs ocres, et les cheminées fument dans le froid du matin. Je devine des villages, des hameaux ou des maisons isolées. J'imagine des vies.  cet homme qui a fini de déjeuner sur le coin d'une table, qui se lève, va chercher sa parka, enfile ses bottes, puis attrape son fusil et sort en sifflant son chien: il part à la chasse. À moins qu'il ne prenne pas son fusil mais un bâton pour aller marcher sur l'herbe craquante des champs blanchis par le gel. J'imagine très bien cette scène car je l'ai moi-même vécu bien souvent, le chien en moins. J'aime le froid du matin sur la nature, cet air vivifiant qui pique les joues, et fait s'embrumer l'haleine.

Plus loin, sans doute, une famille s'éveille: les petits poussent de petits cris joyeux pendant que la maman prépare les tartines et le chocolat brûlant... 

Je me demande si je ne me suis pas endormi ?

Nous passons au pied du Mont Granier dont tout un pan s'est récemment écroulé: on en voit encore les cicatrices, plus claires que le reste de la paroi grisâtre. La route sinue dans la forêt tout en s'élevant. Les feuilles des arbres sont incroyablement colorées, avec des jaunes vifs presque fluorescents. Nous croisons quelques 4x4 de chasseurs avec leur gilets fluo. Le col, où nous arrivons enfin, nous ouvre la vue sur le massif de la Chartreuse... magnifique !

Nous arrivons enfin à La Plagne. Je connais de nom la station de ski, mais ici, c'est d'un petit village qu'il s'agit: la route s'y arrête. Le nombre de voitures garées nous impressionne et puis nous réalisons que c'est dimanche, qu'il est déjà 10h et que de nombreuses balades démarrent ici,  notamment pour aller au Mont Granier. Mais notre but n'est pas celui-là: c'est le plus modeste Mont Pinet, appelé aussi: le Truc. J'aime le charme discret des sommets méconnus et obscurs. Je crois bien, dans ma vie, n'avoir fait que peu de sommets connus pour ce qu'ils représentaient, comme le Mont Blanc par exemple, et je n'en tire aucune gloire particulière. J'avoue qu'ils m'ont souvent déçu...  peut-être est-ce parce que je me les imaginais plus grandioses ? Par contre, beaucoup de sommets méconnus et peu fréquentés m'ont apporté de grands émerveillements

Nous nous garons sur un parking, assez bas sur la route: dix minutes de marche de plus qu'il n'était prévu au depart. J'ai dit que la route s'arrêtait là: nous sommes, en effet, dans un grand cirque barré de murailles rocheuses. Je sais que le sommet est à droite car j'ai étudié le cheminement sur la carte. Je devine que le sentier va passer vers cette zone, là haut, où la marée des arbres tente de se faufiler par un passage étroit entre les murailles. Le chemin est large et bien entretenu et très vite, il se met à monter en lacets. J'ai démarré d'un bon pas mais la pente est telle que je réduis bientôt mon allure:  la pensée me vient que je m'essouffle très vite, aujourd'hui... Il est vrai que c'est notre première vraie sortie depuis plus d'un mois et j'ai un peu perdu l'entraînement. Ce n'est pas beau de vieillir. Mes hanches me font souffrir: je ne suis pas encore chaud.  Heureusement, mon genou me laisse tranquille...pour l'instant, mais j'appréhende un peu la descente: c'est surtout là que je le sens. Bah ! Ne pensons plus à ça: comme je le dis souvent, je me mets en position off, et je marche en regardant autour de moi. Petit à petit, je ne pense plus à la douleur...ou bien est-ce elle qui m'oublie ? je n'approfondis pas.

Cette montée n'en finit pas... nous dépassons un couple qui souffle un peu. L'homme me demande en riant si je n'aurais pas une corde pour le tirer ? Je réponds sur le même ton, en lui disant que si: j'en ai une, mais elle est au fond du sac, et que je suis bien désolé, mais si je m'arrête, je ne repars plus !  Nous les dépassons, avec de grands sourires. J'aime ces petites rencontres et ces échanges amicaux avec des inconnus.

J'ai trouvé mon pas de croisière: ni trop rapide, ni trop lent, et surtout très régulier dans son rythme, le pas du montagnard, disait un vieux que j'ai connu, avec une pause "réglementaire" environ toutes les deux heures, en plus de courts arrêts pour enlever un vêtement, satisfaire un besoin naturel, boire une gorgée d'eau, prendre une photo, écouter la montagne qui respire, ou tout simplement  profiter quelques secondes du bonheur d'être là.

L'air est toujours froid et pourtant je transpire à grosses gouttes. Là est mon problème:  quand je marche, j'ai toujours trop chaud,  et je suis obligé de me mettre un bandeau à la pirate pour empêcher la sueur de me couler dans les yeux. J'ai acheté ce bandana, il y a bien des années, lors d'un séjour aux Baléares,  et je ne regrette pas cet achat... C'était dans une autre vie. Toujours est-il qu'avec cela, je ressemble à un bandit espagnol, mais c'est bien confortable, et c'est ce qui compte.

Enfin la forêt s'éclaircit, tandis que la pente se redresse; encore un petit effort, je devine que le col n'est pas loin: je sens un peu d'air. Nous débouchons sur un alpage à l'herbe rase. J'adore les alpages, c'est même mon paysage préféré: alpages des Alpes, des Pyrénées ou des Causses,  tous m'enchantent. Ce col s'appelle justement le col de l'Alpette. Nous redescendons de l'autre côté, vers des cabanes qui doivent se trouver là, d'après la carte. Nous les atteignons assez vite, au fond d'un genre de petit bassin plat. L'une est une longue cabane, apparemment ancienne, au toit assez bas, devant laquelle des gens s'occupent de chevaux, et l'autre, en face, est une maison de facture plus récente, mais elle est fermée. Entourée d'un enclos de fil de fer, fermé lui aussi,  dans lequel on distingue les squelettes métalliques de tables et de bancs,  qui ont été démontés à l'arrivée de la mauvaise saison. Il doit y avoir du passage, ici, l'été.

Nous partons vers le fond du vallon sur la gauche, vers un sentier qui remonte dans la forêt. Nous rattrapons un couple assez âgé, dont le pas est plus lent que le nôtre. Une fois passé un léger raidillon, nous nous retrouvons sur un genre de plateau au milieu des conifères, sur lequel circule une large coulée d'herbe humide, qui borde un sentier qui se devine à peine. Nous marchons ainsi assez longtemps dans cette endroit un peu encaissé. Pris d'un doute, je consulte ma carte et le gps de mon smartphone. Aïe, c'est bien ce que je craignais: nous avons dérivé un peu trop à gauche et raté le sentier. Nous coupons à droite, un peu à l'estime, à travers la forêt, heureusement fort praticable, pour essayer de rattraper le bon sentier.  Nous y arrivons,  pour nous rendre compte que le couple âgé, qui lui, est resté sur le bon chemin, nous a rattrapé. Nous entendons des voix devant : il y a une famille par là qui monte aussi. Nous les rattrapons bientôt. Le terrain a changé: il est plus accidenté, avec plus de roches, de replis de terrain, et quelques bons raidillons dans les rochers, où il faut même mettre les mains. Le sentier est moins marqué et de plus en plus difficile à suivre. La famille s'est trompée: ils sont partis un petit peu trop à droite. Maintenant que j'ai retrouvé ou nous sommes, je tiens le chemin que j'ai mémorisé tout à l'heure au vu de la carte et je ne le lâche plus. Nous distançons un petit peu la famille, et c'est heureux: ils ont tendance à parler fort, or, en montagne, nous apprécions le silence. Pourquoi les gens ont-ils toujours tendance à parler très fort ? On se dirait presque que c'est pour meubler et se cacher la sauvagerie de la nature. 

De temps en temps, nous distinguons la ligne des arbres sur le ciel, ce qui nous donne à penser que le sommet n'est pas si loin, mais ce n'est qu'une illusion. Nous continuons à marcher. J'ai mon second souffle et n'ai plus mal nulle part: j'ai l'impression à présent que je pourrais marcher ainsi pendant des heures. Le sentier remonte à présent vers des barres rocheuses. Nous les longeons par la droite en passant à leur pied. A notre gauche, s'ouvre un petit ravin peu profond. Ce paysage est étrange et un peu magique. De loin en loin, de petites anfractuosités s'ouvrent dans le rocher. Nous passons sous de petits surplombs où l'herbe au bord du sentier est complètement sèche. Petit à petit, nous nous élevons et en nous retournant, nous pouvons discerner à présent le sommet du Mont Granier derrière nous. Pourquoi ce chemin ne fait-il penser aux hommes préhistoriques ? Les grottes, sans doute ?  je ne sais pas: comme je l'ai dit plus haut, il plane sur ces lieux une atmosphère étrange. D'ailleurs, je l'apprendrai plus tard, ce n'est pas très loin de là, sur le Mont Granier, qu'il a été retrouvé dans une grotte, des squelettes d'ours des cavernes...

Nous croisons plusieurs petits groupes de randonneurs qui redescendent. Pour la plupart, ceux-ci connaissent les règles de la montagne et nous laissent passer: priorité à ceux qui montent, mais au moins un couple n'en a cure, et nous marcherait presque dessus pour passer sans s'arrêter et sans un sourire ! Cela arrive malheureusement de plus en plus souvent.

Le fond du ravin remonte, tandis que les barres rocheuses s'abaissent et nous arrivons sous un nouveau col. La vue qui s'offre à nous sur la croix de l'Alpe et la chaîne de Belledonne est magnifique !  Je note machinalement que l'air est devenu vraiment glacial et que le ciel se couvre rapidement de gris: du sud-ouest viennent des nuages de plus en plus gros. Il est vrai que la météo avait dit que le temps se détériorait en fin de journée et il est déjà 14h. Aussi, nous ne nous attardons pas, et partons sur la droite dans les arbres qui s'éclaircissent, vers l'endroit où nous supposons que se trouve le sommet.

Enfin, nous sortons de la forêt et pouvons à présent discerner non loin la croix au sommet. La crête que nous atteignons bientôt, nous offre une vue grandiose sur la Chartreuse, avec un éclairage très particulier à travers les nuages gris. Au loin, on distingue le sommet caractéristique de Chamechaude. Nous longeons la crête au bord du gouffre. Il y a un peu de vent et il est vraiment glacial: même moi, qui ne suis, en général, pas frileux, je le sens. Un temps de neige, me dis-je...

A cause de ce froid, nous ne resterons pas longtemps au sommet: nous préférons redescendre au col et trouver un endroit plus abrité pour déjeuner. Il y a du monde un peu partout, et les meilleures places sont bien sûr, prises. Nous trouvons tout de même un endroit un peu à l'écart, face au massif de Belledonne, mais d'où nous pouvons distinguer tout de même vers l'est, le Mont Blanc ! Comment ne l'avais-je pas remarqué plus tôt ?

Maintenant que nous sommes arrêtés, je sens soudain le froid sur moi, je réalise alors que je suis plus fatigué que je ne le pensais: le froid me pénètre jusqu'aux os et je tremble comme une feuille. Nous nous asseyons le plus confortablement possible et déballons nos sacs. J'enlève mon t-shirt trempé de sueur, en enfile un sec, plus deux autres à manches longues, une surveste sans manches, une petite doudoune sans manches également et mon coupe vent. J'enlève mon bandana, le remplace par un bonnet, et enfile des gants. Ouf, ça va mieux ! Le cas échéant, j'ai encore d'autres vêtements en réserve: mon sac est toujours très lourd mais au moins, je peux parer à toute éventualité, l'expérience m'a appris qu'on ne sait jamais ce qui peut arriver.

Nous mangeons rapidement. L'air de rien, je surveille le ciel:  je ne veux pas inquiéter ma compagne mais je n'ai pas non plus envie que nous nous fassions surprendre par l'orage: il y a quelques passages, au retour, où la pluie pourrait devenir dangereuse, en rendant le terrain glissant.

Une fois restaurés, nous ne nous attardons pas et repartons. Pour l'instant, je garde tout ce que j'ai sur moi. En effet, j'ai encore le froid sur moi, et je préfère attendre de m'être un peu plus réchauffé, avant d'enlever couche après couche.

Nous redescendons le long de la barre rocheuse par le même chemin qu'à l'aller, jusqu'à ce que je devine un sentier qui part sur la gauche. Il me revient alors en mémoire que sur la carte, il existe un sentier variante que nous avions envisagé de prendre pour la descente. Sur le petit guide que nous avons consulté, ils en parlaient également, mais est-ce bien celui-ci ? Encore une fois mon GPS me donne une indication utile. Je me demande, un bref instant, comment ai-je pu me passer de cet instrument, pendant toutes ces années ?  Bah, je ne me suis jamais perdu pourtant: j'étudiais mieux la carte et consultait boussole et altimètre. Je les ai toujours dans le sac, au cas où: eux ne tombent jamais en panne...  Bref, mon intuition était la bonne: c'était bien là que commençait ce sentier. Nous l'empruntons donc. Il est beaucoup moins marqué que l'autre: on sent bien que peu de monde l'utilise. D'ailleurs les gens qui descendaient derrière nous, ne nous ont pas suivis, bien que j'ai vu qu'ils ont hésité, en nous voyant bifurquer. Je consulte régulièrement mon gps, que que j'ai couplé à une carte IGN. Je préfère faire ainsi car nous ne sommes pas loin du bord de la falaise et je ne voudrais pas que nous en approchions trop: en vieillissant, je deviens plus prudent. Je sais que l'on peut s'engager parfois dans des chemins qui semblent évidents et faciles mais qui le deviennent parfois de moins en moins. Après, il suffit d'un faux pas, d'une petite glissade pour qu'une rando sympa devienne dramatique. J'ai vécu cela une fois et je n'ai vraiment pas envie de recommencer. L'herbe est ici très mouillée et bien couchée, signe que de la neige la recouvrait, il n'y a pas si longtemps.... Je retrouve, ici, l'atmosphère étrange qu'il y avait plus haut, le long de la muraille, en plus sauvage, d'autant que nous sommes dans un creux, à l'ombre. Plusieurs arbres sont morts, couchés, arrachés. Les petites barres rocheuses sous lesquelles nous passons, sont luisantes d'humidité. Quelques conifères tentent de s'y accrocher, et ceux qui n'y sont pas arrivés et ont laché prise, gisent à leurs pieds. Ceci ajouté à l'orage qui menace toujours, fait que je ne me sens pas complètement à l'aise. J'accélère un peu le pas. Ma compagne suit tant bien que mal. Autant à la montée, c'est souvent elle qui est devant, autant à la descente, elle a le pied moins sûr. Elle m'appelle souvent le cabri ! De temps en temps, je m'arrête pour l'attendre, parfois avec une pointe d'inquiétude lorsqu'elle tarde trop. Nous arrivons sur un terrain plus clément, dans une forêt avec quelques feuillus: signe que nous sommes bien descendus. Après un virage à droite, nous remontons enfin vers un petit défilé qui coupe la barre rocheuse, et qui débouche sur le bassin où se trouvent les cabanes. J'avoue avoir pensé un moment que nous arriverions peut-être plus bas que cela, juste en dessous du col de l'Alpette, non pas côté cabanes mais côté vallée de retour, mais non: cette descente un peu en devers était trompeuse: nous sommes toujours sur le même versant.

Nous remontons à présent l'alpage vers le col de l'Alpette. Le froid est toujours présent mais moins vif que là haut : j'enlève quelques couches, car je recommence à transpirer. Nous redescendons vers la vallée de l'autre côté.

Il n'est pas loin de 17h,  et pourtant nous rencontrons tout de même des gens qui montent encore à cette heure-là, et sans gros sacs, ce qui veut dire qu'ils ne comptent pas coucher là-haut.  l'une d'elles nous demande si le col ou le sommet vers lequel ce chemin monte est encore loin. Nous nous regardons, abasourdis: ainsi les gens voient un chemin et ils montent comme cela sans vraiment savoir où il va, et en plus de cela, avec des chaussures qui ne sont pas vraiment adaptées au terrain ?!!! 

Notre descente se passe sans histoires, si ce n'est qu'elle nous paraît bien longue: c'est que cela fait plusieurs heures que nous marchons et la pause déjeuner n'a pas été suffisamment longue pour nous rendre toutes nos forces. Mes cuisses commencent à me faire mal et mon genou aussi. Il ne faut pas que j'y pense. La marche continue, interminable. Comme si cela ne suffisait pas, derrière nous, nous entendons des gens qui braillent, s'interpellent à grands cris, et lancent des coups de sifflet à qui mieux mieux. Horrible. Nous essayons de fuir en avant mais ils nous rattrapent. Alors je décide de prendre une nouvelle variante que j'avais repérée à l'aller, et nous retrouvons le calme.  le chemin est plaisant sous bois, mais un peu pentu et avec de gros cailloux qui roulent. Nous mesurons notre fatigue à la manière dont nous titubons un peu. Enfin nous arrivons au village et trouvons une route goudronnée bien lisse. Je sens mes jambes qui lâchent. Ma compagne n'est pas mieux lotie, à ce qu'elle me dit. Il y a bien longtemps que je n'avais pas ressenti ce genre de fatigue: sans doute avons-nous eu les yeux plus grands que le ventre, en décidant de faire cette randonnée...

Dieu que c'est bon de s'asseoir enfin, puis d'enlever les grosses chaussures afin d'en enfiler de plus confortables, de se changer, d'enfiler une veste bien chaude et de serrer ses mains autour d'une tasse brûlante dans laquelle on a versé un thé que ma compagne a heureusement prévu dans un thermos. Le bonheur tient à peu de chose...

Nous reprenons la voiture et nous rentrons mais cette fois, nous allons passer par Saint-Pierre de Chartreuse et non pas par l'autoroute: nous ne sommes pas vraiment pressé et le paysage est très beau dans ce coin...

lundi, novembre 20 2017

Quand la nuit tombe sur le Barétous

Le jour de mon anniversaire, j'ai décidé de m'offrir deux choses: D'abord, une grasse matinée, parce que, moi qui ait pourtant au sein de ma famille une réputation de dormeur invétéré, ça fait longtemps que ça ne m'est pas arrivé...et puis disons ce qui est, je sais que je vais être seul aujourd'hui, et dormir, ça meuble ! Donc une grasse mat', et puis une petite balade en solitaire.
Au départ, ça ne m'aurait pas déplu d'être accompagné, mais personne ne s'est proposé...faut dire que je ne l'ai pas crié sur les toits. Seul petit problème, j'ai une réunion boulot à 14 heures et donc je ne serais pas libre avant 15 h. Tant pis !
Je vais à ladite réunion en tenue de rando: il y a bien longtemps que je ne m'embarrasse plus de détails de ce genre: je suis comme je suis ! Et mon sac est tout prêt dans ma voiture. Réunion: boudiou qu'est-ce qu'on peut perdre comme temps en parlotte ! J'ai horreur de ça: moi ce que j'aime, c'est l'efficacité et le gain de temps. Enfin, c'est comme ça. Quand je sors, il est 16 h ! J'hésite un court instant: la balade que j'ai prévue dure 1h30, 2h, il me faut environ 20 minutes pour arriver à pied d'œuvre, et le soleil se couche vers 17h30, donc, il y a des chances que je finisse à la nuit...J'hésite en pensée, mais je suis déjà parti !
Une fois sur place, je me chausse, tout en me demandant encore si c'est bien raisonnable:
La nuit ne me fait pas peur: j'ai déjà quelques aventures nocturnes à mon palmarès, la pire étant la fois ou avec deux amis, on s'étaient fait choper par une avalanche un hiver, près du Carlit et après moultes aventures, on étaient arrivés à la voiture à 23 h avec une belle pleine lune ! Tiens, je raconterais ça, un de ces quatre...
Mais bon: là, la vallée n'est pas loin, l'altitude n'est que d'environ 500 m, la balade pas trop longue, les risques sont limités et qui plus est, si jamais, j'ai, de toutes façons, toujours tout ce qu'il faut dans mon sac pour pallier à une nuit dehors, quelle que soit la sortie: t-shirts manches longues en rab, veste polaire, petite doudoune, bonnet, couverture de survie, sac de couchage de survie, lampe, de quoi faire du feu, de l'eau, de quoi manger, canif, et même un sifflet pour appeler au secours ! A une époque, j'avais même une petite corde, mais l'ayant utilisée à autre chose, et abîmée, je l'ai enlevée. Je n'aime pas être pris au dépourvu, on ne sait jamais.
Je pars d'un bon pas. C'est lundi, et hier je me suis tapé deux balades: une le matin sur route, d'environ 11km, soit 3 heures de marche sans se presser et une autre l'après midi en montagne de 2 heures. Cependant, je ne ressens pas de fatigue, le lendemain, au contraire, je me sens dans une forme éblouissante...Sauf que le dimanche matin, j'ai chopé une grosse ampoule au talon et que la balade de l'après midi n'a pas arrangé les choses. Je ne suis pas maso, mais je sais que j'ai une bonne résistance à la douleur des ampoules vu que j'en ai souvent eu par le passé, et puis maintenant, je sais bien les soigner: je sais que si ça fait mal au début, au bout d'un moment même si la sensation y est toujours, la douleur diminue, comme si le cerveau libérait ce qu'il fallait pour cela. De toutes façons, dame nature ne m'a jamais gâté de ce côté-là: comme si ça ne suffisait pas, ces dernières années se sont rajouté d'autres trucs, mais bon je ne vais pas me plaindre, ce n'est pas ma nature: c'est ainsi, et je fais avec.
En sortant du bois, la piste contourne le soum de Souek en une longue courbe montante assez raide, qui part vers le nord et j'essaie de ne pas trop ralentir mon pas: je n'oublie pas que si je me balade pour le plaisir, j'ai aussi pour objectif de retrouver un certain niveau physique qui doit me permettre de retourner faire du ski alpin sans m'esquinter quelque chose et l'été prochain de refaire de grandes rando en montagne: je ne sais pas si je tiendrai mon objectif qui est de refaire le Vignemale d'ici mes 60 ans, mais je fais tout pour. Pourtant, je prends quand même mon temps en ce sens que je m'arrête fréquemment pour faire des photos: voir l'album de cette balade ici
J'adore ce coin: le Barétous ! Même ce nom a une sonorité qui m'enchante...
Entraînement d'accord, mais faire de jolies photos est aussi mon dada. Et puis tout de même faut pas non plus que je force trop...à mon âge !!! Nan, je rigole.
Je vois à présent la plaine au loin...et ben je suis bien mieux ici !
Tout en marchant, le premier couplet d'un chant que j'apprends en ce moment avec ma chorale me monte aux lèvres:

Adiskide bat bazen, orotan bihotz behera (Il y avait un ami, un être profond et sensible)
Poesiaren hegoek (transfiguré par les ailes de la poésie,)
Sentimentuzko bertsoek antzaldatzen zutena.(par les vers surgis d’un profond sentiment intérieur.)

Les sonorités de ce beau chant me donnent des frissons: Xalbadorren heriotzean, et je peux chanter ici à pleine voix sans problème !
Ayant complètement contourné le soum (peut-être vous demandez vous ce qu'est un soum ? C'est: sommet, en occitan, et en béarnais aussi) Je me dis que je le grimperais bien, même s'il n'y a pas de sentier: de l'autre côté c'était le coin des fougères, mais là, c'est plus facile, car c'est une herbe rase et encore verte qui pousse. Je me fais la réflexion que ce pâturage a sûrement dû être obtenu un jour par écobuage, vous savez quand on fait cramer les fougères ?
Hop je me hisse au-dessus de la piste en me cramponnant aux herbes. Je pars en travers vers le sud: la pente est tout de même un peu raide pour la prendre de face, et puis je suis pas au bagne, hein ? De toutes façons je veux aller par là-bas pour mieux voir la chaîne des Pyrénées, et ces troupeaux qui paissent, de l'autre côté de cette clôture.
Vache et moutons. Ces derniers s'enfuient à mon approche, et seule une vache - Bonjour Madame ! - se tourne curieusement vers moi. Je sors mon smartphone: Clic ! In the boîte !

Vache

J'essaie d'aller tout en haut pour avoir une vue sur la vallée, mais il y a des barbelés partout et j'hésite à la franchir: d'une part, je me méfie un peu des vaches, dont je trouve les sabots un peu gros et les cornes un peu pointues (rire) mais surtout je me méfies des éventuels patous qui gardent parfois les troupeaux: entre les chiens et moi, ça n'a jamais été une folle histoire d'amour, et donc, je fais demi-tour. Je reviens au chemin que j'avais quitté. D'après la carte, je dois continuer encore un peu avant de trouver un embranchement qui me ramène à mon point de départ à travers une forêt. Je marche donc. Le soleil descend de plus en plus, il arrive en rasant le sous-bois à droite du chemin. J'aime bien les sous-bois et celui-ci est particulièrement beau: le sol est jonché de feuilles mortes mais demeure très accessible, les troncs sont assez espacés, Il y a là un mélange de lumière et d'ombre qui ajoute au mystère du lieu. Je m'attendrais presque à y voir des ombres énigmatiques !

sousbois

Je rejoins une piste exactement à l'endroit prévu par la carte. Je remonte le long d'une croupe herbeuse en suivant une large piste qui semble récente. Le soleil baisse encore, et je me dis, encore une fois, que je vais sans doute rentrer à la nuit...Bah ! Que m'importe ? Personne ne m'attend.
Redescendant de l'autre côté de la croupe, j'aperçois de loin une silhouette venant vers moi, Tiens ? Un autre candidat aux promenades tardives ? C'est une femme, un peu plus âgée que moi. Nous nous arrêtons pour nous saluer: j'apprécie beaucoup ce genre de rencontres qui sont en général assez chaleureuses. Si on ne se connait pas, on se sait par contre avoir le même goût pour ces paysages, ainsi que pour les promenades solitaires, cela créé tout de suite un lien particulier. Nous échangeons sur les endroits d'où nous venons et le chemin qu'il nous reste à faire. Je ne comprends pas bien d'où elle vient, ni où elle va: elle indique un probable chemin qu'elle aurait raté, et qui se situe bien loin dans la vallée. Je lui montre ma carte, mais elle ne semble pas très sûre de l'endroit où nous sommes, ça me rassure: il n'y a pas qu'à moi que cela arrive ! Après un bref salut, nous repartons chacun de notre côté. Le soleil continue à baisser, je prends quelques photos:

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la montagne au loin commence à devenir "froide", j'entends par là que tout sombre dans les bleus, couleur froide par excellence, surtout le bleu nuit, et rien que de voir cela, je sens l'humidité qui monte. C'est l'heure où les lumières s'allument un peu partout, et où l'on sent que la montagne peut devenir quelque peu inhospitalière. Je ne déteste pas être dehors à ce moment-là. Le sentiment que j'éprouve est très étrange: d'un côté je songe que je suis un minuscule point dans cette immensité bleutée, et de l'autre j'ai pourtant une bonne conscience de mon existence, à mes alentours immédiats: je fais partie d'un tout, mais je suis moi tout de même, et j'en ressens l'importance. Oui: très ambigu ce sentiment...
Je commence à me poser quelques questions sur mon cheminement: cela fait belle lurette que j'aurais dû tomber sur l'embranchement dont parle le guide, or là je descends, je descends, mais rien ! Je pense que j'ai dû rater quelque chose, mais où ? Je réfléchis en étudiant la carte: le retour devait s'effectuer en forêt, or il va faire bientôt nuit, non que dis-je ? ça commence déjà ! Nous sommes entre chien et loup. Ne devrais-je pas faire demi-tour tant que j'y vois encore bien ? ça fait longtemps que cela ne m'est pas arrivé, mais je n'ai pas de fierté particulière qui me retienne de le faire: je ne déteste pas marcher de nuit, mais il commence à faire bien froid et bien que j'ai tout ce qu'il faut dans mon sac pour pallier à cela, je ne me vois pas non plus marcher des heures sans savoir au juste si je suis sur la bonne route. Donc, c'est décidé: demi-tour !
La pente, si agréable à descendre, l'est beaucoup moins à remonter ! Boudiou, je m'essouffle ! C'est ce moment-là que choisit mon frangin pour m'appeler afin de me souhaiter un bon anniversaire: je sursaute en entendant la sonnerie, qui me parait fort incongrue en ces lieux. Mais ça me fait bien plaisir. Il s'étonne de me savoir encore dehors à cette heure-là, s'inquiète un peu, mais il me connait bien et sait que même si je suis, comme il dit, "folklo", je ne fais pas n'importe quoi quand même: je tiens à ma peau et j'ai un peu d'expérience. J'en profite pour souffler un peu...

Cette fois, j'y suis: ça y est, le soleil disparaît !

soleilcouchant_20112017

Des lueurs roses effleurent encore le haut des sommets enneigés, tandis que tout le reste se fond petit à petit dans les mauves...

soirmontagne_20112017

Tout autour de moi, tout devient noir, mais j'y vois suffisamment pour ne pas avoir besoin d'allumer ma frontale, aussi, je la laisse dans mon sac. De nouveau, le même genre de sentiment que tout à l'heure: les alentours tout noirs, et la montagne au fond encore un peu lumineuse: deux états différents pour un même endroit sur terre...
Mes yeux s'habituent à l'obscurité et je reconnais des endroits où je suis passé à l'aller...vu qu'à présent le chemin redescend tout le temps, je marche plus vite, et d'un pas plus léger.
Avant de replonger dans la forêt qui va m'amener jusqu'au parking, une dernière photo du village au-dessous dont les lumières s'allument:
lumieresvillage_20112017

mardi, novembre 7 2017

Le jardin des fées

Ce matin dimanche, petite balade... Humide ! La pluie était glacée: la neige n'est pas si loin. Cependant, cela avait son charme: c'était un paysage de fougères rousses, de chênes tirant sur l'ocre, et d'arbustes jaune d'or. Une véritable harmonie de tons mordorés.
Comme à mon habitude, je vais d'un bon pas, en short et simple t-shirt, malgré l'air vif, au milieu du groupe habillé frileusement. Depuis des années, on ne cesse de me plaisanter sur mon système thermorégulateur, parait-il mal réglé ! Que voulez-vous, je suis ainsi: je me rappelle un jour en pleine tempête de neige sur un glacier, dans les Alpes, avoir été en bras de chemise, avec pour seul lainage un bonnet sur la tête, alors que mes amis, eux, engoncés dans leurs doudounes, me regardaient d'un air incrédule, et puis le soir au refuge, ils s'étaient étonnés qu'il me faille trois couvertures sur le dos, alors qu'eux n'en supportaient même pas une seule ! C'est comme ça: dehors, j'ai rarement froid, et dedans, j'aime avoir bien chaud.

La balade ne sera pas trop longue, m'a-t-on dit, et cela vaut mieux: la pluie menace. Nous allons vers le col d'Etche, au jardin des fées. Pourquoi ce joli nom ? Tout simplement, parce que en saison, vers mai, juin, les pentes des collines sont recouvertes de la belle Asphodèle Blanche et que de loin, cette fleur ressemble à des fées s'élevant du sol. Tout est sujet à rêverie, en Barétous....

La pente est raide. Autour de moi, tout le monde marche silencieusement, la tête baissée. Moi pas: mon regard est attiré de partout, tant je vois de beauté: qui une feuille, qui une goutte d'eau, qui une branche à la forme étrange...je suis un peu esthète, à ma manière.
Je prends quelques photos qui ne rendent guère, mais je m'en doutais: certains éclairages sont si fugaces qu'il faudrait marcher l'appareil à la main, le doigt sur le bouton.
Après un bon rampaillou, sous les arbres, nous débouchons à ciel ouvert, et nous faisons une pause pour attendre les derniers. Cette fois, les vestes sont tombées, je me sens moins seul !
Nous bavardons, et je ne suis pas le dernier à plaisanter: j'aime rire, cela a toujours été.
A présent, le retour va s'effectuer en descente douce par une grande boucle, et maintenant, nous avons le souffle pour parler; je vais d'une personne à l'autre: j'aime le contact, faire connaissance, et rire, toujours. Toutefois, j'aime aussi être un peu isolé de temps en temps, cela me laisse le temps de prendre des photos: j'aimerai saisir la tache rouge de l'arbre à côté de cette maisonnette blanche, les troncs blanc argent des bouleaux qui se détachent sur le roussi des fougères, et cette forêt aux tons mordorés...mais le soleil ne donne pas assez, et mon smartphone en zoom n'est pas très net...ou alors c'est moi qui tremble, c'est très possible: j'ai toujours eu tendance a trembler, et ce, depuis tout jeune. Voyez plutôt:

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La balade était courte: nous sommes déjà revenus aux voitures, à peine une heure et demi après notre arrivée sur place.
Nous cassons une petite croûte au bord d'un gave aux eaux marrons: je me fais la réflexion que cette couleur est étonnante pour un court d'eau qui s'appelle le vert... mais c'est signe qu'il pleut plus haut, sans aucun doute.
C'est à présent que j'ai froid...

Une fois rentré chez moi, je grignote, tout en feuilletant un petit guide de rando: demain il devrait faire beau, et je ne compte pas rester en plaine: je suis seul et quand c'est ainsi, je préfère être là haut...
J'ai vraiment très froid à présent, malgré la bonne douche chaude qui a détendu mes muscles, tout à l'heure, et je me demande si ma chaudière ne s'est pas arrêtée: cela lui arrive de temps en temps...ouf: non: les radiateurs sont chauds. J'enfile un pull supplémentaire, puis, ayant allumé la télé et m'étant allongé sur mon canapé, je me glisse sous une couverture, pour regarder confortablement une superbe émission sur les peuples du néolithique. Bien au chaud, je sombre dans une douce torpeur, tandis que mon chat vient s'allonger sur mon ventre: pas folle la bête ! Bah, tant qu'elle ne me laboure pas la peau de ses griffes, je ne dis rien. Il fait bon...
J'ai dormi, j'ai même fait un rêve étrange: je rêvais que je dormais, puis que, m'étant éveillé, je n'arrivais pas à ouvrir les yeux, même en forçant ! C'était très angoissant. S'y mêlaient mon gamin et ma convive de ces jours derniers...
J'ai finalement réussi à me réveiller. Je rejette alors ma couverture et enlève mon pull. Il est 17h, j'ai soif, c'est l'heure du thé... Ah, il va falloir que j'aille acheter du pain...à moins que je n'ai le courage de m'en faire.
Mon retour sur terre passe par cette contingence bassement matérielle qu'est l'estomac ! ;)

mardi, octobre 17 2017

balade en moyenne montagne - chap.1

Nous partons en voiture du village vers 9 heures; il fait frais, mais pas vraiment froid.

J'ai eu un peu de mal à me lever ce matin, et vu que je ne suis que passager, je ne me force pas: je reste silencieux, engoncé dans ma veste... Pour une fois que je ne conduis pas, je vais pouvoir profiter du paysage en laissant aller mes pensées. Les trois femmes avec lesquelles je suis monté, elles, discutent, et ça ne me dérange pas, bien au contraire: qu'elles m'oublient...

Nous allons dans un coin que je ne crois pas connaitre.

Il n'y a pas grand monde sur la route ce dimanche matin. Cela fait longtemps que je n'étais pas passé par là et je me rends compte que la route a été refaite d'un beau goudron tout noir, auquel il manque encore le marquage horizontal; je remarque en passant que les conducteurs ont souvent tendance à toujours s'écarter du bord de la route, en pareil cas...bizarre, parce que pour ma part, ça me fait en général, l'effet inverse.

Nous tournons à présent pour remonter la vallée qui va vers notre lieu de départ. L'herbe est encore pleine de rosée: cela ne fait pas longtemps que le soleil réchauffe la terre, à cet endroit.

La route commence à dessiner des lacets et nous nous élevons à présent rapidement au-dessus de la vallée. Les arbres sont encore verts, même si certains commencent à tirer vers l'ocre jaune, voire rouge par endroit...plus loin, des troncs blancs de bouleaux...voilà qui me fait remonter des souvenirs: mais oui, je suis déjà venu ici, à une époque où je recherchais des bouleaux, justement !

La vue sur la vallée est de plus en plus belle et comme à chaque fois, cela me fait le même effet: l'impression de quitter le monde normal pour entrer dans un autre monde, celui des hauteurs, de la paix, de la sérénité...et de la sueur ! Me revient en mémoire ce bouquin de Jean Jacques Rousseau, étudié au lycée, qui parlait de l'influence bienfaisante de la montagne (lire un article à ce sujet), j'ai toujours senti cette influence, pour ma part: là-haut, je ne me sens pas le même, là-haut est mon domaine, mon moi suprême. Je ris intérieurement: voilà que je deviens lyrique, à présent !

Les piquets rouges et blancs du bord de la route, nous rappellent qu'il y a de la neige, ici, l'hiver. La conductrice n'est guère tentée de longer le bord vertigineux de la route: elle reste plutôt au milieu, ce qui fait que je n'ai que peu le loisir de regarder l'abîme. Je me prends à penser qu'il m'a toujours paru étrange d'être plus à l'aise dans une pente pareille, sur de la neige avec des skis aux pieds, que sans neige, à pied: en effet, à ski, les pentes raides ne m'ont jamais effrayé, au contraire, je les ai souvent recherchées, tandis qu'à pied, cela m'évoque un peu trop irrésistiblement la chute mortelle d'une connaissance, à laquelle j'ai malheureusement assisté avec impuissance quand j'avais dix-sept ans. Penser à la neige me redonne encore une fois envie de reprendre le ski...mais je verrais à la saison d'hiver: pour l'instant, je suis pour ainsi dire en convalescence, je manque cruellement d'entrainement, j'ai mal partout et il ne faut pas que j'aille trop vite en besogne. Qu'importe: la patience et la ténacité sont des vertus que j'ai toujours eu tendance à cultiver soigneusement...sans toujours y arriver, certes, mais avec l'âge vient la sagesse, dit-on ?

Mais voici que nous arrivons à la fin du trajet en voiture. Je reconnais cette fois tout à fait l'endroit: je me rappelle même y avoir pris une photo, et avoir retouché ladite photo, pour y supprimer ce parking qui enlaidit quelque peu le coin, même s'il est bien utile.

Comme toujours en pareil cas, je rechigne un peu à me déplier et à sortir du confort d'un siège moelleux et d'un habitacle chaud.
Ah bah, il fait bon: je ne vais même pas garder ma veste pour démarrer la marche ! J'hésite tout de même à me mettre en short...Il est bien loin le temps où je n'emportais pas de vêtements de rechange, parce que officiellement, cela faisait du poids supplémentaire, et surtout parce que je n'osais pas me changer devant tout le monde !

Je sors mon sac du coffre de la voiture...Nom de nom, je n'avais pas fait attention qu'il était si lourd en partant de chez moi ! On nous annonce qu'on peut laisser les sacs, dans les voitures: la balade n'est pas trop longue et nous pique-niquerons ici, au retour. Je n'hésite qu'un bref instant: sans sac, je me sens comme nu, j'ai l'impression qu'il m'équilibre...et puis surtout, j'y ai tout mon équipement: petits et gros casse-dalle, un litre et demi d'eau, change, petite doudoune légère,chapeau, canif, pharmacie, couverture de survie, mini-serviette, un bout de matelas en mousse et même de quoi faire du feu ! Des habitudes prises, il y a longtemps: auprès d'un vieux qui ne doit plus être de ce monde aujourd'hui, mais qui m'a tout appris: on sait quand on part, on ne sait pas quand on revient, et j'ai toujours préféré parer à toute éventualité, ça m'a bien servi par le passé; il est donc certaines choses que j'ai toujours dans le sac, même pour de petites balades. Cette fois-ci, par contre, je n'ai pris ni boussole, ni altimètre, ni carte, ni...ah zut, j'ai oublié mes jumelles ! Bref, aujourd'hui, je me laisse mener, ce n'est pas désagréable. Ceci dit, pour en revenir au sac, il faut aussi que je me ré-entraîne à son port....

Ce sac-ci est monté avec moi au Mont Blanc, de même que ma gourde toute cabossée. Je regrette beaucoup le sac que j'avais acheté plus tard, plus confortable, plus grand, avec lequel je suis parti bien des fois pour des périples d'une semaine avec mon meilleur ami (paix à son âme). Las ! j'ai eu le malheur de prêter ce sac à quelqu'un...qui l'a prêté à son tour à quelqu'un d'autre (vous le croyez, vous ? Mais comment peut-on faire ça avec quelque chose qui ne nous appartient pas ?!!!) qui a nié ensuite l'avoir jamais eu. Bref, je ne l'ai jamais revu ! Du coup, il est rare aujourd'hui que je prête quelque chose à quelqu'un: il faut vraiment que j'aie confiance, ou que je ne tienne pas trop à l'objet.

J'enfile donc les bretelles du sac, et j'en boucle la ceinture. En fait, j'ai l'habitude de changer régulièrement le réglage du sac, sans l'enlever, tantôt en appui sur les reins, tantôt très haut sur les épaules, ça dépend du terrain, et mon sac permet ce genre de chose, j'avais choisis celui-ci en partie pour cela.

Les premiers pas sont plus faciles que je n'aurais cru: en me levant ce matin, j'avais mal partout, et je ne savais pas comment ça allait se passer, mais apparemment ça se présente bien: je suis presque euphorique !

Déjà je sors mon smartphone/appareil photo: je m'en sers plus pour les photos que pour le téléphone ! Les vieux instincts reviennent, je salue le soleil qui commence à monter au dessus des crêtes: hop ! Un p'tit contre-jour comme je les aime. Issarbe1

Le paysage est à présent composé d'herbe rase, de rochers qui affleurent, ça et là d'arbustes et de genêts, et toujours la vallée, dans le fond, avec ses maisons si petites. Je me sens bien.

Nous passons bientôt un genre de col qui nous mène sur l'autre versant, où l'on domine une autre vallée, cette fois-ci perpendiculaire à celle où nous sommes montés. Au loin quelques monts, dont l'un que je soupçonne fortement d'être le point culminant du pays basque... Issarbe2

Celui-là, j'irais le revisiter quand je serais un peu plus en jambes: c'est une marche de 3 heures environ qu'on fait souvent en automne, avant qu'il y ait de la neige

Si vous voulez avoir une idée du paysage depuis ce sommet, c'est ici

La piste herbeuse que nous suivons maintenant longe le versant sud, tout en descendant dans une forêt de hêtres. De loin en loin quelques sapins commencent à nous montrer que nous sommes déjà à une certaine altitude. Nous arrivons à un premier lacet assez large, dépourvu d'arbres, sur lequel le soleil donne bien et cela nous paraît l'endroit idéal pour une petite halte. Boire, grignoter. Nous nous faisons passer nos paquets de biscuits, c'est un moment de partage. Certains ont pensé à emporter un thermos de café et la tasse circule. Je ne suis pas très fan du café le matin, et je préfère laisser ma part à quelqu'un d'autre qui l'appréciera plus que moi. Je suis assis, adossé à mon sac, et je ferme un peu les yeux. mmmh, il fait bon. Les gens se lèvent, car il faut repartir. J'attends un peu, car je commence à avoir chaud et je voudrais enlever mon pantalon pour me mettre en short, sans pour autant faire un striptease devant tout le monde...Quand je repars, je suis seul, les autres sont loin. J'aime bien cet instant de silence. Je marche d'un bon pas. Quand je commence à voir mes amis, une petite envie naturelle me prend et je me mets sur le côté pour la satisfaire.Je relève la tête et waouh ! une superbe lumière sur les feuilles me donne envie de prendre une photo. Superbes couleurs d'automne...

Feuilles_15102017
Les circonstances des belles photos sont souvent étranges et inattendues :-)

La piste cesse de descendre pour aller à présent quasiment à l'horizontale: nous sortons de la forêt pour aller rejoindre un petit col.

col_15102017

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